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CONSIDÉRATIONS

plaint avec raison, en France, de ce que le peuple est peu religieux ; mais, si l’on veut se servir du clergé pour ramener l’ancien régime, on est certain d’accroître l’incrédulité par l’irritation.

Que pouvoit-on avoir en vue, par exemple, en substituant à la fête de Napoléon, le 15 août, une procession pour célébrer le vœu de Louis XIII, qui consacre la France à la Vierge ? Il faut convenir que cette nation françoise a terriblement d’âpreté guerrière, pour qu’on la soumette à une cérémonie si candide. Les courtisans suivent cette procession dévotement, pour obtenir des places, comme les femmes mariées font des pèlerinages pour avoir des enfans ; mais quel bien fait-on à la France, en voulant mettre en honneur d’anciens usages qui n’ont plus d’influence sur le peuple ? C’est l’accoutumer à se jouer de la religion, au lieu de lui rendre l’habitude de la révérer. Vouloir donner de la puissance à des superstitions qui n’en ont plus, c’est imiter don Pèdre de Portugal, qui, lorsqu’il fut sur le trône, retira du tombeau les restes d’Inès de Castro, pour les faire couronner : elle n’en fut pas plus reine pour cela.

Combien ces remarques sont loin de s’appli-