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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

que la révolution n’étoit qu’une rébellion de vingt-cinq années. En prononçant ces paroles, il s’étoit rendu incapable d’être utile à la chose publique ; car, si cette révolution n’est qu’une révolte, pourquoi donc consentir à ce qu’elle amène le changement de toutes les institutions politiques, changement consacré par la charte constitutionnelle ? Pour être conséquent, il auroit fallu répondre à cette objection, que la charte étoit un mal nécessaire auquel on devoit se résigner, tant que le malheur des temps l’exigeoit. Or, comment une telle manière de voir pouvoit-elle inspirer de la confiance ? comment pouvoit-elle donner aucune stabilité, aucune force à un ordre de choses nominalement établi ? Un certain parti considéroit la constitution comme une maison de bois dont il falloit supporter les inconvéniens, en attendant que l’on rebâtît la véritable demeure, l’ancien régime.

Les ministres parloient en public de la charte avec le plus grand respect, surtout lorsqu’ils proposoient les mesures qui la détruisoient pièce à pièce ; mais, en particulier, ils sourioient au nom de cette charte, comme si c’étoit une excellente plaisanterie que les droits d’une nation. Quelle frivolité, grand Dieu ! et sur les bords d’un abîme ! Se peut-il qu’il y ait dans