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CONSIDÉRATIONS

çue, qu’elle satisfit momentanément les esprits. On put espérer alors l’heureuse réunion de la légitimité dans le souverain, et de la légalité dans les institutions. Le même roi pouvoit être Charles II par ses droits héréditaires, et Guillaume III par sa volonté éclairée. La paix sembloit conclue entre les partis ; l’existence de courtisan étoit laissée à ceux qui sont faits pour elle ; on plaçoit dans la chambre des pairs les noms illustrés par l’histoire et les hommes de mérite du temps présent ; enfin, la nation dut croire qu’elle répareroit ses malheurs, en tournant vers l’émulation de la liberté constitutionnelle l’activité dévorante qui l’avoit consumée elle-même, aussi bien que l’Europe.

Deux seuls dangers pouvoient anéantir toutes ces espérances : l’un, si le système constitutionnel n’étoit pas suivi par l’administration avec force et sincérité ; l’autre, si le congrès de Vienne laissoit Bonaparte à l’île d’Elbe, en présence de l’armée françoise. C’étoit un glaive suspendu sur le trône des Bourbons. Napoléon, en combattant jusqu’au dernier instant contre les étrangers, s’étoit mieux placé dans l’opinion des François ; et peut-être alors avoit-il plus de partisans sincères que pendant sa prospérité