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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

intérêts accumulés par la révolution ; la suppression des dîmes et des droits féodaux ; la vente des biens nationaux ; l’anéantissement des priviléges de la noblesse et du clergé ; tout ce qui fait la richesse et la grandeur de la masse du peuple, la rendoit nécessairement ennemie des partisans de l’ancien régime, qui se présentoient comme les défenseurs exclusifs de la famille royale ; et jusqu’à ce que la charte constitutionnelle eût prouvé la modération et la sagesse éclairée de Louis XVIII, il étoit naturel que le retour des Bourbons fit craindre tous les inconvéniens de la restauration des Stuarts en Angleterre.

L’empereur Alexandre jugea de toutes les circonstances comme l’auroit pu faire un François éclairé, et il fut d’avis qu’un pacte devoit être conclu, ou plutôt renouvelé entre la nation et le roi ; car, si autrefois les barons fixoient les limites du trône et exigeoient du monarque le maintien de leurs priviléges, il étoit juste que la France, qui ne faisoit plus qu’un peuple, eût par ses représentans le même droit dont jouissoient jadis, et dont jouissent encore les nobles dans plusieurs états de l’Europe. D’ailleurs, Louis XVIII n’ayant pu revenir en France que par l’appui des étrangers, il impor-