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CONSIDÉRATIONS

tend avec raison de lui qu’il se hâtera de faire à son pays tout le bien que les lumières de ce pays permettent. Mais, quoiqu’il maintienne encore une grande force armée, on auroit tort de le considérer en Europe comme un monarque ambitieux. Ses opinions ont plus d’empire sur lui que ses passions ; et ce n’est pas, ce me semble, à des conquêtes qu’il aspire ; le gouvernement représentatif, la tolérance religieuse, l’amélioration de l’espèce humaine par la liberté et le christianisme, ne sont pas à ses yeux des chimères. S’il accomplit ses desseins, la postérité lui décernera tous les honneurs du génie : mais si les circonstances dont il est entouré, si la difficulté de trouver des instrumens pour le seconder, ne lui permettent pas de réaliser ce qu’il souhaite, ceux qui l’auront connu sauront du moins qu’il avoit conçu de grandes pensées.

Ce fut à l’époque même de l’invasion de la Russie par les François, que l’empereur Alexandre vit le prince royal de Suède, autrefois le général Bernadotte, dans la ville d’Albo, sur les bords de la mer Baltique. Bonaparte avoit tout essayé pour engager le prince de Suède à se joindre à lui, dans son attaque contre la Russie ; il lui avoit présenté l’appât de la Finlande, qui