Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/364

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
357
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

qui peuvent largement fonder leur justification sur leur ignorance.

Notre révolution, comme nous l’avons déjà dit, a presque suivi les différentes phases de celle d’Angleterre, avec la régularité qu’offrent les crises d’une même maladie. Mais la question qui agite aujourd’hui le monde civilisé, consiste dans l’application de toutes les vérités fondamentales sur lesquelles repose l’ordre social. L’avidité du pouvoir a fait commettre aux hommes tous les forfaits dont l’histoire est souillée ; le fanatisme a secondé la tyrannie ; l’hypocrisie et la violence, la ruse et le fer ont enchaîné, trompé, déchiré l’espèce humaine. Deux périodes ont seules illuminé le globe : c’est l’histoire de quelques siècles de la Grèce et de Rome. L’esclavage, en resserrant le nombre des citoyens, permit que le gouvernement républicain pût s’établir même dans des états assez étendus, et les plus grandes vertus en sont résultées. Le christianisme, en affranchissant depuis les esclaves, en civilisant le reste de l’Europe, a fait à l’existence individuelle un bien, source de tous les autres. Mais le désordre dans l’ordre, le despotisme, s’est constamment maintenu dans plusieurs pays ; et toutes les pages de notre histoire sont ensanglantées, ou par