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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

Quel mépris pour les lumières, quelle impatience contre les lois, quel besoin du pouvoir ne remarque-t-on pas dans tous ceux qui ont mené long-temps la vie des camps ! De tels hommes peuvent aussi difficilement se soumettre à la liberté, que la nation à l’arbitraire ; et dans un pays libre, il faut, autant qu’il est possible, que tout le monde soit soldat, mais personne en particulier. La liberté angloise ne pouvant avoir rien à craindre que de l’esprit militaire, il me semble que sous ce rapport le parlement doit s’occuper sérieusement de la situation de la France : il le devroit aussi par ce sentiment universel de justice qu’on peut attendre de la réunion d’hommes la plus éclairée de l’Europe. Son intérêt propre le lui commande ; il faut relever l’esprit de liberté que la réaction causée par la révolution françoise a nécessairement affaibli ; il faut prévenir les prétentions vaniteuses à la manière du continent, qui se sont glissées dans quelques familles. La nation angloise tout entière est l’aristocratie du reste du monde, par ses lumières et ses vertus. Que seroient à côté de cette illustration intellectuelle quelques disputes puériles sur les généalogies ! Enfin, il faut mettre un terme à ce mépris des nations sur lequel la