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CONSIDÉRATIONS

minorité moins pénibles. Un roi doit, comme Henri IV, renoncer jusqu’à un certain point à ceux même qui l’ont servi dans son adversité, parce que, si Louis XIV étoit coupable, en prononçant ces fameuses paroles : « L’état, c’est moi, » l’homme de bien sur le trône doit dire, au contraire : Moi, c’est l’état.

La masse du peuple n’a pas cessé, depuis la révolution, de craindre l’ascendant des anciens privilégiés ; d’ailleurs, comme les princes étoient absens depuis vingt-trois ans, la nation ne les connaissoit pas ; et les troupes étrangères, en 1814, ont traversé la France sans entendre exprimer ni un regret pour Bonaparte, ni un désir prononcé pour aucune forme de gouvernement. Ce fut donc une combinaison politique, et non un mouvement populaire, qui rétablit l’ancienne dynastie en France ; et si les Stuarts, rappelés par la nation sans aucun secours étranger, et soutenus par une noblesse qui n’avoit jamais émigré, se perdirent en voulant s’appuyer sur le droit divin, combien n’étoit-il pas plus nécessaire à la maison de Bourbon de refaire un pacte avec la France, afin d’adoucir l’amertume que doit causer à un peuple fier l’influence des étrangers sur son gouvernement intérieur ! Il falloit donc qu’un appel à la nation sanction-