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CONSIDÉRATIONS

ment qu’il en céderoit à bon marché, même à la France ; et pourtant la défense d’exportation hors d’Angleterre a presque uniquement porté sur les principes de la liberté, tandis que nous aurions désiré, au contraire, qu’à cet égard aussi, les Anglois voulussent bien nous communiquer les produits de leur industrie.

Le gouvernement anglois veut à tout prix éviter le retour de la guerre ; mais il oublie que les rois de France les plus absolus n’ont pas cessé de former des projets hostiles contre l’Angleterre, et qu’une constitution libre est bien plus une garantie pour la durée de la paix, que la reconnaissance personnelle des princes. Mais ce qu’on doit surtout, ce me semble, représenter aux Anglois, même à ceux qui sont exclusivement occupés des intérêts de leur patrie, c’est que si, pour empêcher les François d’être factieux ou libres, comme on le voudra, il faut entretenir une armée angloise sur le territoire de la France, la liberté de l’Angleterre est exposée par cette convention indigne d’elle. On ne s’accoutume point à violer l’indépendance nationale chez ses voisins, sans perdre quelques degrés d’énergie, quelque nuance de la pureté des doctrines, lorsqu’il s’agit de professer chez soi ce qu’on renie ailleurs.