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CONSIDÉRATIONS

pays. Mais cette noble émotion, loin d’étouffer la générosité, la ranime ; et si Fox faisoit entendre encore sa voix si long-temps admirée, s’il demandoit pourquoi les soldats anglois servent de geôliers à la France, pourquoi l’armée d’un peuple libre traite un autre peuple comme un prisonnier de guerre qui doit payer sa rançon à ses vainqueurs, la nation angloise apprendroit que l’on commet en son nom une injustice ; et, dès cet instant, il naîtroit de toutes parts dans son sein des avocats pour la cause de la France. Un homme, au milieu du parlement anglois, ne pourroit-il pas demander ce que seroit l’Angleterre aujourd’hui, si les troupes de Louis XIV s’étoient emparées d’elle, au moment de la restauration de Charles II ; si l’on avoit vu camper dans Westminster l’armée des François triomphante sur le Rhin, ou, ce qui auroit fait plus de mal encore, l’armée qui, plus tard, combattit les protestans dans les Cévennes ? Elles auroient rétabli le catholicisme et supprimé le parlement ; car nous voyons, dans les dépêches de l’ambassadeur de France, que Louis XIV les offroit à Charles II dans ce but. Alors que seroit devenue l’Angleterre ? l’Europe n’auroit pu entendre parler que du meurtre de Charles Ier, que des excès des pu-