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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

CHAPITRE VII.

De la conduite du gouvernement anglois hors de l’An-
gleterre
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EN exprimant, autant que je l’ai pu, ma profonde admiration pour la nation angloise, je n’ai cessé d’attribuer sa supériorité sur le reste de l’Europe à ses institutions politiques. Il nous reste à donner une triste preuve de cette assertion ; c’est que là où la constitution ne commande pas, on peut avec raison faire au gouvernement anglois les mêmes reproches que la toute-puissance a toujours mérités sur la terre. Si par quelques circonstances qui ne se sont point rencontrées dans l’histoire, un peuple eût possédé, cent ans avant le reste de l’Europe, l’imprimerie, la boussole, ou, ce qui vaut bien mieux encore, une religion qui n’est que la sanction de la morale la plus pure, ce peuple seroit certainement fort supérieur à ceux qui n’auroient pas obtenu de semblables avantages. Il en est de même des bienfaits d’une constitution libre ; mais ces bienfaits sont nécessairement bornés au pays même qu’elle ré-