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CONSIDÉRATIONS

de l’original. Les élégans, en France, cherchoient à faire effet, et tâchoient d’éblouir par tous les moyens possibles, bons ou mauvais. En Angleterre, cette même classe de personnes veut se distinguer par le dédain, l’insouciance et la perfection du blasé. C’est assez désagréable ; mais dans quel pays du monde la fatuité n’est-elle pas une ressource de l’amour-propre pour cacher la médiocrité naturelle ? Chez un peuple où tout est prononcé, comme en Angleterre, les contrastes sont d’autant plus frappants. La mode a un singulier empire sur les habitudes de la vie, et cependant il n’est point de nation où l’on trouve autant d’exemples de ce qu’on appelle l’excentricité, c’est-à-dire, une manière d’être tout-à-fait originale, et qui ne compte pour rien l’opinion d’autrui. La différence entre les hommes qui vivent sous l’empire des autres et ceux qui existent en eux-mêmes se retrouve partout ; mais cette opposition des caractères ressort davantage par le mélange bizarre de timidité et d’indépendance qui se fait remarquer chez les Anglois. Ils ne font rien à demi, et tout à coup ils passent de la servitude envers les moindres usages à l’insouciance la plus complète du qu’en dira-t-on. Néanmoins, la crainte du ridicule