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CONSIDÉRATIONS

plus sérieuses. D’ailleurs, le bonheur des Anglois étant fondé sur la vie domestique, il ne leur conviendroit pas que leurs femmes se fissent, comme en France, une famille de choix d’un certain nombre de personnes constamment réunies.

On ne doit pas nier, cependant, qu’à tous ces honorables motifs il ne se mêle quelques défauts, résultats naturels de toute grande association d’hommes. D’abord, quoiqu’il y ait en Angleterre beaucoup plus de fierté que de vanité, cependant on y tient assez à marquer, par les manières, les rangs que la plupart des institutions rapprochent. Il y a de l’egoïsme dans les habitudes, et quelquefois dans le caractère. La richesse et les goûts qu’elle donne en sont la cause : on ne veut se déranger en rien, tant on peut se bien arranger en tout. Les liens de famille, si intimes dans le mariage, le sont très-peu sous d’autres rapports, parce que les substitutions affranchissent trop les fils aînés de leurs parens, et séparent aussi les intérêts des frères cadets de ceux de l’héritier de la fortune. Les majorats nécessaires au maintien de la pairie ne devroient peut-être pas s’étendre aux autres classes de propriétaires ; c’est un reste de féodalité dont il faudrait, s’il