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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

tout si on les rapporte au temps actuel. Toutefois un tel genre de vie ne rend point propre aux agrémens de la société. Les François n’étant appelés, ni par leurs affaires, ni par leurs goûts, à demeurer à la campagne, l’on trouvoit à Paris, toute l’année, des maisons où l’on pouvoit jouir d’une conversation très-agréable ; mais de là vient aussi que Paris seul existoit en France, tandis qu’en Angleterre la vie politique se fait sentir dans toutes les provinces. Lorsque les intérêts de l’état sont du ressort de chacun, la conversation qui doit attirer le plus est celle dont les affaires publiques sont le but. Or, dans celle-là ce n’est pas la légèreté d’esprit, mais l’importance réelle des choses dont il s’agit. Souvent un homme, fort peu agréable d’ailleurs, captive ses auditeurs par la force de son raisonnement et de son savoir ; l’art d’être aimable en France consistoit à ne jamais épuiser un sujet, et à ne pas trop s’arrêter sur ceux qui n’intéressoient pas les femmes. En Angleterre, elles ne se mêlent jamais aux entretiens à voix haute ; les hommes ne les ont point habituées à prendre part à la conversation générale : quand elles se sont retirées du dîner, cette conversation n’en est que plus vive et plus animée. Une maîtresse de maison ne se