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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

faire payer de l’argent par le séducteur de la femme. Comme tout est empreint d’un sentiment de noblesse en Angleterre, je ne jugerai point légèrement une coutume de ce genre, puisqu’on la conserve. Il faut atteindre de quelque manière aux torts des hommes envers les mœurs, puisque l’opinion est en général trop relâchée à cet égard, et personne ne prétendra qu’une grande perte d’argent ne soit pas une punition. D’ailleurs, l’éclat de ces procès funestes fait presque toujours un devoir à l’homme d’épouser la femme qu’il a séduite ; et cette obligation est une garantie qu’il ne se mêle ni légèreté, ni mensonge, aux sentimens que les hommes se permettent d’exprimer. Quand il n’y a que de l’amour dans l’amour, ses égaremens sont à la fois plus rares et plus excusables. J’ai de la peine à m’expliquer, cependant, pourquoi c’est au mari que l’amende est payée par le séducteur ; souvent aussi le mari ne l’accepte pas, et c’est aux pauvres qu’il la consacre. Mais il y a lieu de croire que deux motifs ont donné naissance à cette coutume, l’une, de fournir à l’époux, dans une classe sans fortune, les moyens d’élever ses enfans, quand la mère qui en étoit chargée lui manque ; l’autre, et c’est un rapport plus essentiel, de mettre en cause