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CONSIDÉRATIONS

zélés du despotisme. Le clergé a lutté jadis contre les rois de France, pour soutenir l’autorité de Rome ; mais maintenant tous les privilégiés font ligue entre eux. Il n’y a que la nation qui n’ait d’autre appui qu’elle-même. Ils veulent un tiers état qui ne puisse occuper aucun emploi élevé, pour que ces emplois soient tous réservés aux nobles. Ils veulent que le peuple ne reçoive point d’instruction, pour en faire un troupeau d’autant plus facile à conduire. Ils veulent une armée dont les officiers fusillent, arrêtent et dénoncent, et soient plus ennemis de leurs concitoyens que des étrangers. Car, pour refaire l’ancien régime en France, moins la gloire d’une part, et ce qu’il y avoit de liberté de l’autre, moins l’habitude du passé qui est rompue, et en opposition avec l’attachement invincible au nouvel ordre de choses, il faut une force étrangère à la nation, pour la comprimer sans cesse. Ils ne veulent point de jurés, parce qu’ils souhaitent le rétablissement des anciens parlemens du royaume. Mais, outre que ces parlemens n’ont pu prévenir jadis, malgré leurs honorables efforts, ni les jugemens arbitraires, ni les lettres de cachet, ni les impôts établis en dépit de leurs remontrances, ils seroient dans le cas des autres priviléges ; ils n’auroient plus leur