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CONSIDÉRATIONS

l’autre, et les mêmes larmes les arrosent ; car ils méritent tous les deux le regret profond que les âmes généreuses doivent accorder à cette noble élite de l’espèce humaine, qui nous sert d’appui dans la confiance en l’immortalité de l’âme.

Qu’on se rappelle le convoi de Nelson, lorsque près d’un million d’hommes, répandus dans Londres et dans les environs, suivoient en silence son cercueil. La multitude se taisait, la multitude étoit respectueuse dans l’expression de sa douleur, comme on pourroit l’attendre de la société la plus raffinée. Nelson avoit mis ces paroles à l’ordre sur son vaisseau, le jour de Trafalgar ; « L’Angleterre attend que chacun de nous fera son devoir. » Il l’avoit accompli ce devoir, et mourant sur son bord, les obsèques honorables que sa patrie lui accorderoit s’offroient à sa pensée comme le commencement d’une nouvelle vie. Et maintenant encore, ne nous taisons pas sur lord Wellington, bien que nous puissions justement en France souffrir en rappelant sa gloire. Avec quel transport n’a-t-il pas été reçu par les représentans de la nation, par les pairs et par les communes ! Aucune cérémonie ne fit les frais de ces hommages rendus à un homme