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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

premier rang ! Les choix des cours sont presque toujours influencés par les motifs les plus étroits : le grand jour des élections populaires ne sauroit être soutenu que par des individus remarquables de quelque manière. Le mérite finira toujours par triompher dans les pays où le public est appelé à le désigner.

Ce qui caractérise particulièrement l’Angleterre, c’est le mélange de l’esprit chevaleresque avec l’enthousiasme de la liberté, les deux plus nobles sentimens dont le cœur humain soit capable. Les circonstances ont amené cet heureux résultat, et l’on doit convenir que des institutions nouvelles ne suffiroient pas pour le produire : le souvenir du passé est nécessaire pour consacrer les rangs aristocratiques ; car, s’ils étoient tous de la création du pouvoir, ils auroient une partie des inconvéniens qu’on a éprouvés en France sous Bonaparte. Mais que faire dans un pays où la noblesse seroit ennemie de toute liberté ’ ? Le tiers état ne pourroit former aucune union avec elle ; et, comme il est le plus fort, il la menaceroit sans cesse, jusqu’à ce qu’elle se fût soumise aux progrès de la raison.

L’aristocratie angloise est plus mélangée que celle de France aux yeux d’un généalogiste ;