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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

brûler la cervelle parce qu’il se reprochoit d’avoir accepté une place indépendamment de son parti. Jamais on n’entend la même bouche proférer deux opinions opposées, et cependant il ne s’agit dans l’état actuel des choses, en Angleterre, que de nuances et non de couleurs. Les Torys, a-t-on dit, approuvent la liberté et aiment la monarchie, tandis que les Whigs approuvent la monarchie et aiment la liberté ; mais entre ces deux partis il ne sauroit être question de la république ou de la royauté, de la dynastie ancienne ou nouvelle, de la liberté ou de la servitude ; enfin, des extrêmes et des contrastes qu’on a vu professer par les mêmes hommes en France, comme si l’on devoit dire du pouvoir ainsi que de l’amour, que l’objet n’importe pas, pourvu que l’on soit toujours fidèle au sentiment, c’est-à-dire, au dévouement à la puissance.

Des dispositions bien contraires se font admirer en Angleterre. Depuis près de cinquante ans, les membres de l’opposition n’ont pas occupé plus de trois ou quatre années les places du ministère ; cependant, la fidélité de parti n’a point été ébranlée parmi eux ; et dernièrement encore, pendant que j’étais en Angleterre, j’ai vu des hommes de loi refuser des places de