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CONSIDÉRATIONS

se nuire à lui-même. On n’admet jamais, comme cela se fait en France, des témoins indirects, c’est-à-dire, qui déposent par ouï-dire. Enfin, toutes les précautions ont pour but l’intérêt de l’accusé. La religion et la liberté président à l’acte imposant qui permet à l’homme de condamner à mort son semblable. L’admirable institution du jury, qui remonte en Angleterre à une haute antiquité, fait intervenir l’équité dans la justice. Ceux qui sont investis momentanément du droit d’envoyer le coupable à la mort, ont une sympathie naturelle avec les habitudes de sa vie, puisqu’ils sont d’ordinaire choisis dans une classe à peu près semblable à la sienne ; et, lorsque les jurés sont forcés de prononcer la sentence d’un criminel, il est du moins certain lui-même que la société a tout fait pour qu’il pût être absous, s’il le méritoit ; et cette conviction doit porter quelque calme dans son cœur. Depuis cent ans, il n’existe peut-être pas d’exemple en Angleterre, d’un homme condamné dont l’innocence ait été reconnue trop tard. Les citoyens d’un état libre ont une si grande portion de bon sens et de conscience, qu’avec ces deux flambeaux ils ne s’égarent jamais.

On sait quel bruit ont fait en France la sen-