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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

que les ministres ne peuvent pas empiéter sur les autorités locales.

La sécurité politique, sans laquelle il ne peut y avoir ni crédit ni capitaux accumulés, ne suffit pas encore pour développer toutes les ressources d’une nation : il faut que l’émulation anime les hommes au travail, tandis que les lois leur en assurent le fruit. Il faut que le commerce et l’industrie soient honorés, non par des récompenses données à tel ou tel individu, ce qui suppose deux classes dans un pays, dont l’une se croit le droit de payer l’autre, mais par un ordre de choses qui permet à chaque homme de s’élever au plus haut rang s’il le mérite. Hume dit que le commerce a encore plus besoin de dignité que de liberté. En effet, l’absurde préjugé qui interdisoit aux nobles de France d’entrer dans le commerce, nuisoit plus que tous les autres abus de l’ancien régime au progrès des richesses françoises. Il y a des pairies en Angleterre accordées nouvellement à des négocians de première classe : une fois pairs, ils ne restent pas dans le commerce, parce qu’ils sont censés devoir servir autrement la patrie ; mais ce sont leurs fonctions de magistrats, et non des préjugés de caste, qui les éloignent de l’état de négociant, dans lequel les fils ca-