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CONSIDÉRATIONS

France, en comparant l’état des finances des deux pays, représentoient toujours l’Angleterre comme abîmée de dettes, et la France comme maîtresse d’un trésor considérable. Le rapprochement étoit vrai, mais il falloit y ajouter que l’Angleterre disposoit par le crédit de moyens sans bornes, tandis que le gouvernement françois ne possédoit que l’or qu’il tenoit entre ses mains. La France pouvoit lever des milliards de contributions sur l’Europe opprimée, mais son souverain despotique n’auroit pu réussir dans un emprunt volontaire.

De Harwich à Londres on parcourt un grand chemin d’environ soixante-dix milles, qui est bordé presque sans intervalle par des maisons de campagne à droite et à gauche : c’est une suite d’habitations avec des jardins, interrompue par des villes. Presque tous les hommes sont bien vêtus, presque aucune cabane n’est en décadence ; les animaux eux-mêmes ont quelque chose de paisible et de prospère, comme s’il y avoit des droits aussi pour eux dans ce grand édifice de l’ordre social. Les prix de toutes choses sont nécessairement fort élevés, mais ces prix sont fixes pour la plupart : il y a tant d’aversion pour l’arbitraire dans ce pays, qu’en dehors de la loi même on place la