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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

bientôt après revêtu de la dignité de chancelier. »

Voilà ce qu’un roi pouvoit faire souffrir à des Anglois, et voilà ce qu’ils supportaient. C’est en 1686 que l’Angleterre donnoit à l’Europe de tels exemples de barbarie et de servitude ; et, deux ans après, lorsque Jacques II fut déposé et la constitution établie, commença cette période de cent vingt-huit ans jusqu’à nos jours, dans laquelle il n’y a pas eu une session du parlement qui n’ait apporté un perfectionnement à l’ordre social.

Jacques II étoit bien coupable ; cependant on ne peut se dissimuler qu’il y eut de la trahison dans la manière dont il fut abandonné. Ses filles lui enlevèrent la couronne. Les personnes qui lui avoient montré le plus d’attachement, et qui lui devoient le plus de reconnoissance, le quittèrent. Les officiers manquèrent à leur serment ; mais, selon une épigramme angloise, le succès ayant excusé cette trahison, on ne l’appela plus ainsi[1].

  1. Treason does never prosper : what’s the reason ?
    Why, when it prospers, none dare call it treason.

    La trahison ne réussit jamais ; quelle en est la raison ? La raison, c’est que, lorsqu’elle réussit, nul n’ose l’appeler trahison.