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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

ployoit toutes les rigueurs de la justice, sans aucun mélange de pitié.

« De toutes les exécutions de cette affreuse époque, les plus atroces furent celles de madame Gaunt et de lady Lisle, accusées d’avoir donné asile à des traîtres. Madame Gaunt étoit une anabaptiste, connue par une bienfaisance qui s’étendoit aux personnes de tous les partis et de toutes les sectes. Un rebelle qui connoissoit son humanité, eut recours à elle dans sa détresse, et trouva un refuge dans sa maison. Bientôt après, ayant entendu parler d’un acte qui offroit une amnistie et des récompenses à ceux qui découvriroient des criminels, il eut la bassesse de trahir sa bienfaitrice, et de déposer contre elle. Il obtint grâce pour sa perfidie. Elle fut brûlée vive pour sa charité.

« Lady Lisle étoit la veuve d’un régicide qui avoit joui de beaucoup de faveur et de crédit sous Cromwell. Elle étoit poursuivie pour avoir donné asile à deux rebelles, après la bataille de Sedge moor. En vain cette femme âgée disoit-elle, pour sa défense, que le nom de ces rebelles ne se trouvoit dans aucune proclamation ; qu’ils n’étoient condamnés par aucune sentence ; que rien ne prouvoit qu’elle eût pu