Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/19

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
12
CONSIDÉRATIONS

et l’étude mal entendue de ces saintes paroles a conduit beaucoup d’hommes à la folie. Les armes nécessaires à la défense peuvent servir à la vengeance et au meurtre. Le feu qui nous réchauffe expose à l’incendie ; les médicamens qui nous guérissent peuvent nous donner la mort. Enfin on ne pourroit éclairer les hommes sur aucun point de gouvernement, on ne pourroit profiter d’aucune des leçons de l’histoire, si les excès auxquels les faux raisonnemens peuvent porter, étoient toujours présentés comme un motif pour interdire la pensée.

« Les sentimens de M. Locke, dit lord Erskine, ont été publiés trois ans après l’avènement du roi Guillaume au trône d’Angleterre, et lorsque ce monarque avoit élevé l’auteur à un rang éminent dans l’état. Mais Bolingbroke, non moins célèbre que Locke dans la république des lettres et sur le théâtre du monde, s’exprime de même sur cette question. Lui qui s’étoit armé pour faire remonter Jacques II sur le trône, il attachoit beaucoup de prix à justifier les jacobites de ce qu’il considéroit comme une dangereuse calomnie ; l’imputation de vouloir fonder les prétentions de Jacques II sur le droit divin, et non sur la