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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

ciations que Dalrymple a publiées, faire venir des troupes françoises en Angleterre, pour s’en servir contre les amis de la liberté. On a peine à se convaincre de la vérité de ces faits, quand on connoît l’Angleterre du dix-huitième et du dix-neuvième siècle. Il y avoit encore des restes de l’esprit d’indépendance chez quelques membres du parlement ; mais comme la liberté de la presse ne les soutenoit pas dans l’opinion, ils ne pouvoient opposer cette force à celle du gouvernement. La loi d’Habeas corpus, celle qui fonde la liberté individuelle, fut portée sous Charles II, et cependant il n’y eut jamais plus de violations de cette liberté que sous son règne ; car les lois sans les garanties ne sont rien. Charles II se fit livrer tous les priviléges des villes, toutes leurs chartes particulières ; rien n’est si facile à l’autorité centrale que d’écraser successivement chaque partie. Les juges, pour plaire au roi, donnèrent au crime de haute trahison une extension plus grande que celle qui avoit été fixée trois siècles auparavant sous le règne d’Edouard III. À cette sérieuse tyrannie se joignoit autant de corruption, autant de frivolité qu’on en a pu reprocher aux François à aucune époque. Les écrivains, les poètes anglois, qui sont maintenant inspirés