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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

éclairés repoussoient en leur nom, craignant de leur fermer à jamais l’entrée de l’Angleterre. Lord Erskine, dans son admirable plaidoyer en faveur du doyen de Saint-Asaph, sur une question de liberté de la presse, cite d’abord le traité de Locke, concernant la question du droit divin et de l’obéissance passive, dans lequel ce célèbre philosophe déclare positivement que tout agent de l’autorité royale qui dépasse la latitude accordée par la loi, doit être considéré comme l’instrument de la tyrannie, et que, sous ce rapport, il est permis de lui fermer sa maison, et de le repousser par la force, comme si l’on étoit attaqué par un brigand ou par un pirate. Locke se fait à lui-même l’objection tant répétée, qu’une telle doctrine répandue parmi les peuples peut encourager les insurrections. « Il n’existe aucune vérité, dit-il, qui ne puisse conduire à l’erreur, ni aucun remède qui ne puisse devenir un poison. Il n’est aucun des dons que nous tenons de la bonté de Dieu dont nous puissions faire usage, si l’abus qui en est possible devoit nous en priver. On n’auroit pas dû publier les Évangiles ; car, bien qu’ils soient le fondement de toutes les obligations morales qui unissent les hommes en société, cependant la connoissance imparfaite