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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

naparte auroit-il supporté la constitution qu’on lui faisoit proclamer ? Lorsque des ministres responsables se seroient refusés à sa volonté, qu’en auroit-il fait ? et si ces mêmes ministres avoient été sévèrement accusés par les députés pour lui avoir obéi, comment auroit-il contenu le mouvement involontaire de sa main, pour faire signe à ses grenadiers d’aller une seconde fois chasser à coups de baïonnettes les représentans d’une autre puissance que la sienne ?

Quoi ! cet homme auroit lu tous les matins dans les journaux des insinuations sur ses défauts, sur ses erreurs ! Des plaisanteries se seroient approchées de sa pate impériale, et il n’auroit pas frappé ! Aussi l’a-t-on vu souvent prêt à rentrer dans son véritable caractère ; et, puisque tel étoit ce caractère, il ne pouvoit trouver de force qu’en le montrant. Le jacobinisme militaire, l’un des plus grands fléaux du monde, s’il étoit encore possible, étoit l’unique ressource de Bonaparte. Quand il a prononcé les mots de loi et de liberté, l’Europe s’est rassurée : elle a senti que ce n’étoit plus son ancien et terrible adversaire.

Une grande faute aussi qu’on a fait commettre à Bonaparte, c’est l’établissement d’une