Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/140

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
133
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

pas trouvé qui se réjouissoient du bouleversement qui pouvoit rappeler les étrangers, et les engager à imposer à la France un gouvernement absolu.

Trois jours se passèrent dans les espérances inconsidérées du parti royaliste. Enfin, le 9 mars, on nous dit qu’on ne savoit rien du télégraphe de Lyon, parce qu’un nuage avoit empêché de lire ce qu’il annonçoit : je compris ce que c’étoit que ce nuage. J’allai le soir aux Tuileries pour faire ma cour au roi ; en le voyant, il me sembla qu’à travers beaucoup de courage il avoit une expression de tristesse ; et rien n’étoit plus touchant que sa noble résignation dans un pareil moment. En sortant, j’aperçus sur les parois de l’appartement les aigles de Napoléon qu’on n’avoit pas encore ôtées, et elles me paroissoient redevenues menaçantes.

Le soir, dans une société, une de ces jeunes dames qui avoient contribué avec tant d’autres à l’esprit de frivolité qu’on vouloit opposer à l’esprit de faction, comme s’ils pouvoient lutter l’un contre l’autre ; une de ces jeunes dames s’approcha de moi, et se mit à plaisanter sur l’anxiété que je ne pouvois cacher : Quoi ! me dit-elle, ? madame, pouvez-vous craindre que les François ne se battent pas