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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

et les progrès du genre humain, est condamnable, uniquement parce que c’est un changement, il sera facile d’opposer à l’ancien ordre de choses que vous invoquez, un autre ordre de choses plus ancien qu’il a remplacé. Ainsi, les pères de ceux de vos aïeux auxquels vous voulez vous arrêter, et les pères de ces pères auroient eu à se plaindre de leurs fils et de leurs petits-fils, comme d’une jeunesse turbulente, acharnée à renverser leurs sages institutions. Enfin, quelle est la créature humaine douée de son bon sens, qui puisse prétendre que le changement des mœurs et des idées ne doive pas en amener un dans les institutions ? Faudra-t-il donc toujours gouverner à trois cents ans en arrière ? ou un nouveau Josué commandera-t-il au soleil de s’arrêter ? Non, dira-t-on, il y a des choses qui doivent changer, mais il faut que le gouvernement soit immuable. Si l’on vouloit mettre en système les révolutions, on ne pourroit pas mieux s’y prendre. Car, si le gouvernement d’un pays ne veut participer en rien à la marche des choses et des hommes, il sera nécessairement brisé par elle. Est-ce de sang-froid qu’on peut discuter si les formes des gouvernemens d’aujourd’hui doivent être en accord avec les besoins de la génération pré-