Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/131

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
124
CONSIDÉRATIONS

la dépouilloit de son droit naturel, en limitant le pouvoir absolu, et s’étoit en conséquence vengée de tous ceux qui en avoient eu la pensée. Le principe de l’hérédité, si indispensable en général au repos des états, y nuisoit nécessairement dans cette circonstance. Les Anglais ont donc fait très-sagement d’appeler au trône la branche protestante ; leur constitution ne se seroit jamais établie sans ce changement. Mais, quand le hasard de l’hérédité vous a donné pour monarque un homme tel que Louis XVIII, dont les études sérieuses et la placidité d’âme s’accordent volontiers avec la liberté constitutionnelle ; et lorsque d’un autre côté, le chef d’une dynastie nouvelle s’est montré pendant quinze années le despote le plus violent que l’on ait vu dans les temps modernes, comment une telle combinaison peut-elle rappeler en rien le sage Guillaume III, et le sanguinaire et superstitieux Jacques II ?

Guillaume III, bien qu’il dût sa couronne à l’élection, trouvoit souvent les manières de la liberté peu gracieuses ; et s’il l’avoit pu, il se seroit fait despote tout comme son beau-père. Les souverains d’ancienne date, il est vrai, se croient indépendans du choix des peuples ; les papes aussi pensent qu’ils sont infaillibles ; les