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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

premier devoir des ministres du roi étoit donc de demander au congrès de Vienne l’éloignement de Bonaparte. Comme Caton dans le sénat de Rome, lorsqu’il répétoit sans cesse : Il faut détruire Carthage, les ministres de France devoient mettre à part tout autre intérêt, jusqu’à ce que Napoléon ne fût plus en regard de la France et de l’Italie.

C’étoit sur la côte de Provence que les hommes zélés pour la cause royale pouvoient être utiles à leur pays, en le préservant de Bonaparte. Le simple bon sens des paysans suisses, je m’en souviens, les portoit à prédire, pendant la première année de la restauration, que Bonaparte reviendrait. Chaque jour, dans la société, l’on essayoit d’en convaincre ceux qui pouvoient se faire écouter à la cour ; mais comme l’étiquette, qui ne règne qu’en France, ne permet pas d’approcher le monarque, et que la gravité ministérielle, autre inconséquence pour les temps actuels, éloignoit des chefs de l’état ceux qui auroient pu leur apprendre ce qui se passait, une imprévoyance sans exemple a perdu la patrie. Toutefois, quand Bonaparte ne seroit pas débarqué à Cannes, le système suivi par les ministres, ainsi que nous avons tâché de le démontrer, avoit déjà com-