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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

soumis doivent toujours, conformément à leur système, aux agens de l’autorité royale, quels qu’ils soient.

Les défenseurs des idées libérales, également opposés aux partisans de l’ancien et du nouveau despotisme, auroient pu se plaindre de se voir préférer les flatteurs de Bonaparte, qui n’offroient pour garantie à leur nouveau maître que le rapide abandon du précédent. Mais que leur importoient toutes les tracasseries misérables de la société ? Il se peut cependant que de tels motifs aient excité les ressentimens d’une certaine classe de gens, au moins autant que les intérêts les plus essentiels. Mais étoit-ce une raison pour replonger le monde dans le malheur, par le rappel de Bonaparte, et pour jouer l’indépendance et la liberté de son pays tout ensemble ?

Dans les premières années de la révolution, on pouvoit souffrir assez du terrorisme de la société, si l’on peut s’exprimer ainsi, et l’aristocratie se servoit habilement de sa vieille considération pour déclarer telle ou telle opinion hors de la bonne compagnie. Cette compagnie par excellence exerçoit jadis une grande juridiction : on avoit peur d’en être banni, on désiroit d’y être reçu, et toutes les prétentions les plus actives erroient autour des grands seigneurs