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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

cette guerre aussi vivement que les émigrés ; car les uns et les autres croyoient qu’une crise quelconque pourroit seule amener les chances dont ils avoient besoin pour triompher.

Au commencement de 1792, avant la déclaration de guerre, Léopold, empereur d’Allemagne, l’un des princes les plus éclairés dont le dix-huitième siècle puisse se vanter, écrivit à l’assemblée législative une lettre, pour ainsi dire, intime. Quelques députés de l’assemblée constituante, Barnave, Duport, l’avoient composée, et le modèle en fut envoyé par la reine à Bruxelles, à M. le comte de Mercy-Argenteau, qui avoit été long-temps ambassadeur d’Autriche à Paris. Léopold attaquoit, dans cette lettre, nominativement le parti des jacobins, et offroit son appui aux constitutionnels. Ce qu’il disoit étoit sans doute éminemment sage, mais on ne trouva pas convenable que l’empereur d’Allemagne entrât dans de si grands détails sur les affaires de France, et les députés se révoltèrent contre les conseils que leur donnoit un monarque étranger. Léopold avoit gouverné la Toscane avec une parfaite modération, et l’on doit lui rendre la justice que toujours il avoit respecté l’opinion publique et les lumières du siècle. Ainsi donc il crut de bonne foi au bien