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CONSIDÉRATIONS

divers grades, auxquels toutes les classes de la nation pouvoient participer, rendoient la conscription moins pénible aux habitans de la campagne. L’intérêt continuel des victoires tenoit lieu de tous les autres ; l’ambition étoit le principe actif du gouvernement dans ses moindres ramifications ; titres, argent, puissance, Bonaparte donnoit tout aux François à la place de la liberté. Mais, pour être en état de leur dispenser ces dédommagemens funestes, il ne falloit pas moins que l’Europe à dévorer. Si Napoléon eût été ce qu’on pourroit appeler un tyran raisonnable, il n’auroit pu lutter contre l’activité des François, qui demandoit un but. C’étoit un homme condamné, par sa destinée, aux vertus de Washington ou aux conquêtes d’Attila ; mais il étoit plus facile d’atteindre les confins du monde civilisé que d’arrêter les progrès de la raison humaine, et bientôt l’opinion de la France auroit accompli ce que les armes des alliés ont opéré.

Maintenant ce n’est plus lui qui seul occupera l’histoire dont nous voulons esquisser le tableau, et notre malheureuse France va de nouveau reparoître, après quinze ans pendant lesquels on n’avoit entendu parler que de l’empereur et de son armée. Quels revers nous