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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

gloire militaire de la France n’étoit pas encore détruit. Aussi le congrès de Paris a-t-il à se reprocher de l’avoir mis dans le cas de revenir. Les représentans de l’Europe doivent avouer franchement cette faute, et il est injuste de la faire porter à la nation françoise. C’est sans aucun mauvais dessein assurément que les ministres des monarques étrangers ont laissé planer sur le trône de Louis XVIII un danger qui menaçoit également l’Europe entière ; mais pourquoi ceux qui ont suspendu cette épée ne s’accusent-ils pas du mal qu’elle a fait ?

Beaucoup de gens se plaisent à soutenir que si Bonaparte n’avoit tenté ni l’expédition d’Espagne, ni celle de Russie, il seroit encore empereur ; et cette opinion flatte les partisans du despotisme, qui veulent qu’un si beau gouvernement ne puisse pas être renversé par la nature même des choses, mais seulement par un accident. J’ai déjà dit ce que l’observation de la France confirmera, c’est que Bonaparte avoit besoin de la guerre pour établir et pour conserver le pouvoir absolu. Une grande nation n’auroit pas supporté le poids monotone et avilissant du despotisme, si la gloire militaire n’avoit pas sans cesse animé ou relevé l’esprit public. Les avancemens continuels dans les