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CONSIDÉRATIONS

gleterre que sa constitution et son industrie, la France auroit aujourd’hui un commerce fondé sur le crédit, un crédit fondé sur la représentation nationale et sur la stabilité qu’elle donne. Mais le ministère anglois sait malheureusement trop bien qu’une monarchie constitutionnelle est le seul moyen, et tout-à-fait le seul, d’assurer à la France une prospérité durable. Quand Louis XIV luttoit avec succès sur les mers contre les flottes angloises, c’est que les richesses financières des deux pays étoient alors à peu près les mêmes ; mais, depuis quatre-vingts ou cent ans que la liberté s’est consolidée en Angleterre, la France ne peut se mettre en équilibre avec elle que par des garanties légales de la même nature. Au lieu de prendre cette vérité pour boussole, qu’a fait Bonaparte ?

La gigantesque idée du blocus continental ressembloit à une espèce de croisade européenne contre l’Angleterre, dont le sceptre de Napoléon étoit le signe de ralliement. Mais si, dans l’intérieur, l’exclusion des marchandises angloises a donné quelque encouragement aux manufactures, les ports ont été déserts et le commerce anéanti. Rien n’a rendu Napoléon plus impopulaire que ce renchérissement du sucre et du café, qui portoit sur les habitudes