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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

nous nous sommes promis de ne point parler, nous croyons pouvoir affirmer que les biens de détail opérés par Bonaparte, les grandes routes nécessaires à ses projets, les monumens consacrés à sa gloire, quelques restes des institutions libérales de l’assemblée constituante dont il permettoit quelquefois l’application hors de France, tels que l’amélioration de la jurisprudence, celle de l’éducation publique, les encouragemens donnés aux sciences ; tous ces biens, dis-je, quelque désirables qu’ils fussent, ne pouvoient compenser le joug avilissant qu’il faisoit peser sur les caractères. Quel homme supérieur a-t-on vu se développer sous son règne ? Quel homme verra-t-on même de long-temps là où il a dominé ? S’il avoit voulu le triomphe d’une liberté sage et digne, l’énergie se seroit montrée de toutes parts, et une nouvelle impulsion eût animé le monde civilisé. Mais Bonaparte n’a pas concilié à la France l’amitié d’une nation. Il a fait des mariages, des arrondissemens, des réunions ; il a taillé les cartes de géographie, et compté les âmes à la manière admise depuis, pour compléter les domaines des princes ; mais où a-t-il implanté ces principes politiques qui sont les remparts,