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CONSIDÉRATIONS

peuple lui déplaisoit toujours. Cet instinct de despote lui a fait élever un trône sans base, et l’a contraint à manquer à sa vocation ici-bas, l’établissement de la réforme politique.

Les moyens de l’empereur pour asservir l’Europe ont été l’audace dans la guerre, et la ruse dans la paix. Il signoit des traités quand ses ennemis étoient à demi terrassés, afin de ne les pas porter au désespoir, et de les affaiblir assez cependant pour que la hache, restée dans le tronc de l’arbre, pût le faire périr à la longue. Il gagnoit quelques amis parmi les anciens gouvernans, en se montrant en toutes choses l’ennemi de la liberté. Aussi ce sont les nations qui se soulevèrent à la fin contre lui, car il les avoit plus offensées que les rois mêmes. Cependant on s’étonne de trouver encore des partisans de Bonaparte ailleurs que chez les François, auxquels il donnoit au moins la victoire pour dédommagement du despotisme. Ces partisans, en Italie surtout, ne sont en général que des amis de la liberté qui s’étoient flattés à tort de l’obtenir de lui, et qui aimeroient encore mieux un grand événement, quel qu’il pût être, que le découragement dans lequel ils sont tombés. Sans vouloir entrer dans les intérêts des étrangers, dont