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CONSIDÉRATIONS

berté que les Anglois se glorifioient de bâtir ? Ils n’en ont fait tout juste que ce qu’il falloit pour se rendre à jamais ridicules aux yeux de l’Europe entière. Les Anglois, du moins, ont appelé de cette prédiction.

Au retour de Notre-Dame, le premier consul, se trouvant au milieu de ses généraux, leur dit : N’est-il pas vrai qu’aujourd’hui tout paroissoit rétabli dans l’ancien ordre ? « Oui, répondit noblement l’un d’entre eux, excepté deux millions de François qui sont morts pour la liberté, et qu’on ne peut faire revivre. » D’autres millions ont péri depuis, mais pour le despotisme.

On accuse amèrement le François d’être irréligieux ; mais l’une des principales causes de ce funeste résultat, c’est que les différens partis, depuis vingt-cinq ans, ont toujours voulu diriger la religion vers un but politique, et rien ne dispose moins à la piété que d’employer la religion pour un autre projet qu’elle-même. Plus les sentimens sont beaux par leur nature, plus ils inspirent de répugnance quand l’ambition et l’hypocrisie s’en emparent. Lorsque Bonaparte fut empereur, il nomma le même archevêque d’Aix, dont nous venons de parler, à l’archevêché de Tours ; et celui-ci,