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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

institutions proposées, pouvoit un jour amener quelque résistance ; mais Sieyes avoit perdu la liberté, en substituant quoi que ce fût à l’élection populaire.

Bonaparte lui-même n’auroit peut-être pas été assez fort pour opérer alors un tel changement dans les principes généralement admis ; il falloit que le philosophe servît à cet égard les desseins de l’usurpateur. Non assurément que Sieyes voulût établir la tyrannie en France, on doit lui rendre la justice qu’il n’y a jamais pris part : et d’ailleurs, un homme d’autant d’esprit ne peut aimer l’autorité d’un seul, si ce seul n’est pas lui-même. Mais, par sa métaphysique, il embrouilla la question la plus simple, celle de l’élection ; et c’est à l’ombre de ces nuages que Bonaparte s’introduisit impunément dans le despotisme.