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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

la terre, et qui ne voyoient dans la France que leur patrimoine, dans les François que leurs sujets, et dans les lois que l’expression de leur bon plaisir. Ce qu’on ne devoit plus voir, on le vit bientôt néanmoins ; et ce que la France souhaitoit en appelant Bonaparte, le repos et la paix, étoit précisément ce que son caractère repoussoit, comme un élément dans lequel il ne pouvoit vivre.

Lorsque César renversa la république romaine, il avoit à combattre Pompée et les plus illustres patriciens de son temps ; Cicéron et Caton luttoient contre lui : tout étoit grandeur en opposition à la sienne. Le général Bonaparte ne rencontra que des adversaires dont les noms ne valent pas la peine d’être cités. Si le directoire même avoit été dans toute sa force passée, il auroit dit comme Rewbell, lorsqu’on lui faisoit craindre que le général Bonaparte n’offrît sa démission : Hé bien, ! acceptons-la, car la république ne manquera jamais d’un général pour commander ses armées. En effet, ce qui avoit rendu les armées de la république françoise redoutables jusqu’alors, c’étoit de n’avoir eu besoin d’aucun homme en particulier pour les conduire. La liberté dé-