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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

d’un grand état et les combinaisons de la tactique.

Le jour de la première bataille des Suisses contre les François, quoique Coppet soit à trente lieues de Berne, nous entendions, dans le silence de la fin du jour, les coups de canon qui retentissoient au loin à travers les échos des montagnes. On osoit à peine respirer pour mieux distinguer ce bruit funeste ; et, quoique toutes les probabilités fussent pour l’armée françoise, on espéroit encore un miracle en faveur de la justice ; mais le temps seul en est l’allié tout-puissant. Les troupes suisses furent vaincues en bataille rangée ; les habitans se défendirent toutefois très-long-temps dans leurs montagnes ; les femmes et les enfans prirent les armes ; des prêtres furent massacrés au pied des autels. Mais, comme il y avoit dans ce petit espace une volonté nationale, les François furent obligés de transiger avec elle ; et jamais les petits cantons n’acceptèrent la république une et indivisible, présent métaphysique que le directoire leur offroit à coups de canon. Il faut pourtant convenir qu’il y avoit en Suisse un parti pour l’unité de la république, et que ce parti comptoit des noms fort respectables. Jamais le directoire n’a influé sur les affaires des nations étran-