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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

participer au gouvernement de son pays, et c’est une injustice que d’en exclure une portion des citoyens. » — Rien n’est plus vrai en principe, lui dis-je, général ; mais il est également vrai que c’est par ses propres efforts qu’il faut obtenir la liberté, et non en appelant comme auxiliaire une puissance nécessairement dominante. — Le mot de principe a depuis paru très-suspect au géneral Bonaparte ; mais alors il lui convenoit de s’en servir, et il me l’objecta. J’insistai de nouveau sur le bonheur et la beauté de l’Helvétie, sur le repos dont elle jouissoit depuis plusieurs siècles. « Oui, sans doute, interrompit Bonaparte, mais il faut aux hommes des droits politiques ; oui, répéta-t-il comme une chose apprise, oui, des droits politiques ; » et changeant de conversation, parce qu’il ne vouloit plus rien entendre sur ce sujet, il me parla de son goût pour la retraite, pour la campagne, les beaux-arts, et se donna la peine de se montrer à moi sous des rapports analogues au genre d’imagination qu’il me supposoit.

Cette conversation me fit cependant concevoir l’agrément qu’on peut lui trouver quand il prend l’air bonhomme, et parle comme d’une chose simple de lui-même et de ses projets. Cet art, le plus redoutable de tous, a captivé beau-