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CONSIDÉRATIONS

quoi. » Bonaparte alors ne répliqua rien. C’est un homme que la résistance véritable apaise ; ceux qui ont souffert son despotisme doivent en être autant accusés que lui-même. Le directoire fit au général Bonaparte une réception solennelle qui, à plusieurs égards, doit être considérée comme une époque dans l’histoire de la révolution. On choisit la cour du palais du Luxembourg pour cette cérémonie. Aucune salle n’auroit été assez vaste pour contenir la foule qu’elle attiroit ; il y avoit des spectateurs à toutes les fenêtres et sur tous les toits. Les cinq directeurs, en costume romain, étoient placés sur une estrade au fond de la cour, et près d’eux les députés des deux conseils, les tribunaux et l’Institut. Si ce spectacle avoit eu lieu avant que la représentation nationale eût subi le joug du pouvoir militaire, le 18 fructidor, on y auroit trouvé de la grandeur ; une belle musique jouoit des airs patriotiques, des drapeaux servoient de dais au directoire, et ces drapeaux rappeloient de grandes victoires.

Bonaparte arriva très-simplement vêtu, suivi de ses aides de camp, tous d’une taille plus haute que la sienne, mais presque courbés par le respect qu’ils lui témoignaient. L’élite