Page:De Staël – La Révolution française, Tome II.djvu/199

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
192
CONSIDÉRATIONS

Dieu de cette idée, et je partis à l’instant même avec le frère du malheureux Norvins ; nous entrâmes tous les deux dans la chambre du général, qui fut bien étonné de me voir. Il commença par me faire des excuses sur sa toilette du matin, sur son appartement ; enfin, je ne pouvois l’empêcher de revenir continuellement à la politesse, quoique je le suppliasse de n’y pas donner un instant, car cet instant pouvoit être irréparable. Je me hâtai de lui dire le sujet de ma venue, et d’abord il me refusa nettement. Mon cœur tressailloit à l’aspect de ce frère qui pouvoit penser que je ne trouvais pas les paroles faites pour obtenir ce que je demandois. Je recommençai mes sollicitations, en me recueillant pour rassembler toutes mes forces : je craignois d’en dire trop, ou trop peu ; de perdre l’heure fatale après laquelle c’en étoit fait, ou de négliger un argument qui pouvoit frapper au but. Je regardois tour à tour la pendule et le général, pour voir laquelle des deux puissances, son âme ou le temps, approchoit le plus vite du terme. Deux fois le général prit la plume pour signer le sursis, et deux fois la crainte de se compromettre l’arrêta ; enfin, il ne put nous refuser, et grâces lui soient encore rendues. Il donna le papier sau-