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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

le moindre crédit sur les autres, quoiqu’ils ne pussent ignorer combien j’aimois la liberté, ils me savoient si mauvais gré de mon attachement pour les proscrits, qu’ils donnèrent l’ordre sur les frontières de la Suisse, à Versoix, près de Coppet, de m’arrêter et de me conduire en prison à Paris, à cause, disoient-ils, de mes efforts pour faire rentrer les émigrés. Barras me défendit avec chaleur et générosité ; et c’est lui qui m’obtint la permission de retourner en France quelque temps après. La reconnaissance que je lui devois entretint entre lui et moi des relations de société.

M. de Talleyrand étoit revenu d’Amérique un an avant le 18 fructidor. Les honnêtes gens, en général, désiroient la paix avec l’Europe, qui étoit alors disposée à traiter. Or, M. de Talleyrand paraissoit devoir être, ce qu’on l’a toujours trouvé depuis, un négociateur fort habile. Les amis de la liberté souhaitoient que le directoire s’affermît par des mesures constitutionnelles, et qu’il choisît dans ce but des ministres en état de soutenir le gouvernement. M. de Talleyrand sembloit alors le meilleur choix possible pour le département des affaires étrangères, puisqu’il vouloit bien l’accepter. Je le servis efficacement à cet égard,