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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

généraux de brigade à Paris pour être aux ordres du directoire. Bonaparte choisit le général Augereau ; c’étoit un homme très-décidé dans l’action, et peu capable de raisonnement, ce qui le rendoit un excellent instrument du despotisme, pourvu que ce despotisme s’intitulât révolution.

Par un contraste singulier, le parti royaliste des deux conseils invoquoit les principes républicains, la liberté de la presse, celle des suffrages, toutes les libertés enfin, surtout celle de renverser le directoire. Le parti populaire, au contraire, se fondoit toujours sur les circonstances, et défendoit les mesures révolutionnaires qui servoient de garantie momentanée au gouvernement. Les républicains se voyoient contraints à désavouer leurs propres principes, parce qu’on les tournoit contre eux ; et les royalistes empruntoient les armes des républicains pour attaquer la république. Cette bizarre combinaison des armes troquées dans le combat s’est représentée dans d’autres circonstances. Toutes les minorités invoquent la justice, et la justice c’est la liberté. L’on ne peut juger un parti que par la doctrine qu’il professe quand il est le plus fort. Néanmoins, quand le directoire prit la fu-