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CONSIDÉRATIONS

duroit toujours ; les troubles civils avoient fait naître des bandes de brigands, connus sous le nom de chauffeurs, qui commettoient d’horribles excès dans les campagnes ; enfin, presque toutes les armées françoises étoient désorganisées.

En six mois le directoire releva la France de cette déplorable situation. L’argent remplaça le papier sans secousse ; les propriétaires anciens vécurent en paix à côté des acquéreurs de biens nationaux ; les routes et les campagnes redevinrent d’une sûreté parfaite ; les armées ne furent que trop victorieuses ; la liberté de la presse reparut ; les élections suivirent leur cours légal, et l’on auroit pu dire que la France étoit libre, si les deux classes des nobles et des prêtres avoient joui des mêmes garanties que les autres citoyens. Mais la sublime perfection de la liberté consiste en ceci, qu’elle ne peut rien faire à demi. Si vous voulez persécuter un seul homme dans l’état, la justice ne s’établira jamais pour tous ; à plus forte raison, lorsque cent mille individus se trouvent placés hors du cercle protecteur de la loi. Les mesures révolutionnaires ont donc gâté la constitution, dès l’établissement du directoire : la dernière moitié de l’existence de ce gouvernement, qui a