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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

On les voyoit lire leur plaidoyer avec une figure pâle et nerveuse, allant d’un côté à l’autre de la tribune de la convention, comme un animal féroce dans sa cage ; étoient-ils assis, ils se balançoient sans se lever ni changer de place, avec une sorte d’agitation stationnaire qui sembloit indiquer seulement l’impossibilité du repos.

Au milieu de ces élémens dépravés, il existoit un parti de républicains, débris de la Gironde, persécutés avec elle, sortant des prisons ou des cavernes qui leur avoient servi d’asile contre la mort. Ce parti méritoit de l’estime à beaucoup d’égards, mais il n’étoit pas guéri des systèmes démocratiques ; et, de plus, il avoit un esprit soupçonneux qui lui faisoit voir partout des fauteurs de l’ancien régime. Louvet, l’un de ces girondins échappés à la proscription, l’auteur d’un roman, Faublas, que les étrangers prennent souvent pour la peinture des mœurs françoises, étoit républicain de bonne foi. Il ne se fioit à personne ; il appliquoit à la politique le genre de défaut qui a fait le malheur de la vie de Jean-Jacques ; et plusieurs hommes de la même opinion lui ressembloient à cet égard. Mais les soupçons des républicains et des jacobins en France